Pouvez-vous vous présenter ?
Je m’appelle Deborah Biernard, j’ai vingt-deux ans de carrière dans le monde hospitalier. J’ai travaillé vingt ans en tant qu’infirmière au sein du service d’orthopédie. Ensuite, j’ai évolué vers une place d’infirmière référente en soins de plaies. Depuis début octobre, je suis Cheffe de service de la clinique des soins de plaies à Humani Charleroi. Concernant mes études, j’ai d’abord réalisé un graduat en soins infirmiers à la Haute Ecole Condorcet. Ensuite, j’ai obtenu un diplôme interuniversitaire en soins de plaies pour terminer par un master en sciences infirmières durant lequel j’ai réalisé une recherche sur le plasma riche en plaquettes.
Pouvez-vous nous en dire un peu plus sur cette recherche concernant le plasma riche en plaquettes ?
Grâce aux études médicales réalisées, on a observé que le plasma riche en plaquettes aidait à la consolidation des tissus osseux qui permet une régénération au niveau du cartilage. Il est aussi utilisé dans d’autres domaines comme en chirurgie urologique pour les problèmes d’incontinence. Face à ce constat, j’ai transposé le fait que si le PRP (plasma riche en plaquettes) « cicatrise » un os, pourquoi ne pourrait-il pas cicatriser une plaie ? Nous avions un chirurgien à l’hôpital qui tâtonnait déjà avec le sujet sans avoir de démarche préétablie mais on a remarqué que ça fonctionnait. J’ai donc décidé de mener une étude qualitative et quantitative pour savoir si le PRP avait sa place dans le traitement des plaies chroniques.
Pouvez-vous nous expliquer la journée d’une infirmière référente en soins de plaies ?
A l’hôpital Humani, il existe un service dédié aux soins de plaies où nous réalisons une fois par semaine ce qu’on appelle un « tour multidisciplinaire » pour lequel différents d’intervenants santé donnent leur expertise concernant le patient. Nous discutons ensemble, avec nos connaissances respectives, de l’avenir du patient et de ce que nous pouvons mettre en place pour une guérison plus rapide de sa plaie ou une prise en charge à la maison. Nous réalisons également un « tour plaies ». Nous passons une fois par semaine avec l’infirmière Cheffe et le médecin auprès du patient pour voir l’évolution de la plaie en fonction du traitement qu’on a instauré la semaine précédente. Le reste du temps, j’ai un rôle de formation c’est-à-dire que je forme les membres du personnel que ce soit les nouveaux arrivants ou le personnel déjà présent sur l’institution. Je fais également de la prévention et des avis en soins de plaies. Les différents services m’appellent quand ils sont face à une plaie qu’ils n’arrivent pas à faire évoluer. Je donne alors le traitement à appliquer avec l’accord du médecin. Je suis également là pour réaliser les pansements qu’on dit complexes donc par exemple, des pansements avec une thérapie par pression négative.
Pourquoi avoir réalisé un Master en Sciences infirmières à l’Hénallux ?
Ce Master m’a apporté une vue globale dans la prise en charge du patient, une vue holistique. Cela m’a permis d’avoir un autre regard sur le rôle de l’infirmière qui n’est pas uniquement de rester au chevet du patient mais qui peut également effectuer de la recherche, de l’education et de la prévention. Ce master m’a également permis d’approfondir mes connaissances. Mais aussi de partager ce que nous en tant qu’infirmières, nous réalisons et qui n’est parfois pas assez valorisé mais qui le sera davantage grâce au statut d’« infirmière de pratique avancée ». En France, cette notion existe déjà mais en Belgique, nous pourrons exercer la pratique avancée en janvier 2025.
Que signifie la pratique avancée ?
Cela signifie « être expert dans un domaine qu’on connait ». Si on veut schématiser, c’est la place entre le patient et le médecin généraliste donc c’est être en première ligne face à la pathologie.
Qu’est-ce que va changer « la pratique avancée » dans le quotidien des infirmières ?
Nous allons avoir toute notre légitimé en tant qu’infirmière avec toutes les connaissances que nous avons acquises lors de nos études et sur le terrain. On devient un liant entre le patient et le médecin généraliste. On va dégrossir l’anamnèse du patient pour que quand il arrive chez le généraliste, il soit là pour voir le médecin. Tous les à-côtés qui peuvent être gérés par l’infirmière le seront en amont.
Que peut-on vous souhaiter pour la suite ?
On peut me souhaiter beaucoup de courage (rire) mais ce sont de très chouettes défis à réaliser.
Camille Biernaux